Les peuples, qui ont une mémoire longue, aspirent à la paix et à vivre en s’appropriant ces droits humains que leurs propres États ont définis.

Civiliser signifie : Faire passer une collectivité à un état social plus évolué, dans l’ordre moral, intellectuel, artistique, technique. (Dict.)
Les droits humains sont, dans leur esprit, des outils pour promouvoir la civilisation contre la barbarie, et non pour monter les civilisations les unes contre les autres par des moyens barbares. En dehors des guerres ethniques (Balkans, Rwanda, etc.), ou pour le pétrole (Irak), il n’y a pas eu de guerre mondiale dans les huit décennies d’élaboration des instruments de droits humains, ce qui historiquement est déjà un résultat. Mais pour combien de temps ?
S’il est vrai que, dans l’histoire, le fait est que les civilisations sont presque toutes nées suite à des conflits et des guerres entre peuples, elles ont été le lieu de croisement de civilisations diverses, ce qui relativise l’idée de pureté ethnique ou culturelle.

Une civilisation est un ensemble de phénomènes sociaux (religieux, moraux, esthétiques, scientifiques, techniques) d’une grande société. (Dict.);
La civilisation est un ensemble des caractères communs aux sociétés les plus complexes ; ensemble des acquisitions des sociétés humaines (opposé à nature, barbarie). (Dict.).

La notion de guerre de civilisations est donc un oxymore, une alliance de deux mots contradictoires. S’il y a guerre, c’est celle de la civilisation contre la barbarie. Si une civilisation engage une guerre contre une autre, elle perd automatiquement son titre de civilisation : il ne peut y avoir de prétention à la supériorité d’une civilisation sur une autre, encore moins à vouloir la faire disparaître.
La barbarie ne peut tout de même pas se présenter comme modèle de société alternative à la civilisation. Il n’y a pas de guerre de civilisation : ce sera la guerre ou la civilisation.

« Nous aurons à choisir entre deux visions de l’avenir :
La première est celle d’une humanité partagée en tribus planétaires, qui se combattent, qui se haïssent, mais qui, sous l’effet de la globalisation, se nourrissent, chaque jour davantage, de la même bouillie culturelle indifférenciée.
La seconde est celle d’une humanité consciente de son destin commun, et réunie de ce fait autour des mêmes valeurs essentielles, mais continuant à développer, plus que jamais, les expressions culturelles les plus diverses, les plus foisonnantes, préservant toutes ses langues, ses traditions artistiques, ses techniques, sa sensibilité sa mémoire, ses savoirs.
D’un côté, donc, plusieurs civilisations qui s’affrontent, mais qui, culturellement, s’imitent et s’uniformisent ; de l’autre, une seule civilisation humaine, mais qui se déploie à travers une infinie diversité.
Amin Maalouf

(1]– Amin Maalouf – in Le dérèglement du monde – Ed. Grasset – 2010

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(Cf. le livre « Des droits qui dérangent ? « , édité sur Amazon, en version digitale et en version papier : https://urlr.me/DHvmnJ )