Immédiatement après les terribles épreuves de la Seconde guerre mondiale, les États se sont résolument engagés dans le chantier des droits humains, avec un esprit de « mondialisation pacifique », sous le chapiteau de l’ONU, laquelle était perçue à l’époque comme la concrétisation de la communauté internationale.
Qu’on en juge d’après cette liste ci-dessous, non-exhaustive, d’instruments juridiques établis par les États (qui s’adressent, d’une certaine manière, à eux-mêmes), en utilisant la métaphore d’un Arbre, dont les racines souterraines sont issues de nombreuses sources dans l’histoire de l’humanité.
Le tronc est la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948) [1]: elle énonce les valeurs fondamentales que les membres de la communauté internationale des États partagent, notamment en matière de droits individuels. Paradoxalement, cette Déclaration universelle ne constitue pas un traité contraignant, mais a pourtant généré des branches, si bien qu’étant la matrice de toutes les conventions et autres textes internationaux sur les droits humains, elle a acquis, de fait, le statut de droit coutumier international, c’est-à-dire consensuelle au point d’être unanimement considérée comme contraignante.
La première branche est le Pacte international sur les Droits civils et politiques (1966) [2]: Les droits civils assurent la protection des individus contre les ingérences de l’État :
L’interdiction de la discrimination, le droit à la vie, l’interdiction de la torture et de traitements inhumains, l’interdiction de l’esclavage, la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de pensée, de conscience et de religion, la liberté d’association et de réunion, la protection de la sphère privée et de la vie de famille, et le droit à une procédure judiciaire équitable.
Les droits politiques permettent aussi aux individus de prendre part à la vie publique (élections, éligibilité, emplois dans la fonction publique, etc.)
La deuxième branche est le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (1966) : « Le droit au travail, le droit à des conditions de travail correctes et acceptables, le droit de s’associer au sein de syndicats, le droit à la sécurité sociale, à la protection de la famille, de la maternité et des enfants, le droit à un niveau de vie convenable (alimentation, habillement, logement), ainsi qu’à une constante amélioration des conditions de vie, le droit à la santé, le droit à l’éducation, le droit de participer à la vie culturelle, aux progrès scientifiques et à leurs applications ainsi que le droit à la protection de la propriété intellectuelle. » [3]
La troisième branche est constituée de Droits de solidarité : ce sont des droits collectifs, comme le droit des peuples à l’auto-détermination, le droit à un développement durable, à la paix, à un environnement sain, au partage dans la mise en valeur du patrimoine commun de l’humanité, le droit à la communication et à l’assistance humanitaire.
Ces droits ne sont pas facultatifs. Dès lors que les pays les ont ratifiés, ils sont contraignants, par décision des États fondateurs. Le paragraphe 5 du Programme d’action du Congrès de Vienne (1993) : Tous les droits de l’homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés. La communauté internationale doit traiter des droits de l’homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d’égalité et en leur accordant la même importance.[4]
Une quatrième branche de droits universels concerne une autre catégorie de droits universels, spécifiques aux droits humains dans les conflits armés : le Droit international humanitaire, inscrit dans les Conventions de Genève (1949 – ratifiées par 196 pays) et leurs Protocoles additionnels (1977 et 2005), exigent de faire une distinction entre combattants et civils, de protéger les prisonniers et les blessés de guerre des souffrances inutiles, de garantir la sécurité des acteurs humanitaires, et de respecter les procédures pénales.[5]
S’il est encore besoin de montrer l’ampleur des domaines dans lesquels la communauté internationale a travaillé pendant des décennies, voici un échantillon de thèmes des Conventions internationales négociées dans le cadre des Nations Unies :
– sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid (1973) ;
– sur la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (Unesco-1960) ;
– sur l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des pratiques analogues (1956) ;
– sur l’égalité de rémunération entre la main-d’œuvre masculine et la main-d’œuvre féminine pour un travail de valeur égale (Organisation Internationale du Travail – OIT -1951) ;
– relative au statut de réfugiés (1951) des apatrides (1954) ;
– pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) ;
– contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1984) ;
– sur la protection des personnes contre les disparitions forcées (2010) ;
– sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1965) ;
– sur la protection des droits des travailleurs migrants et de leurs familles (1990) ;
– aux droits de personnes handicapées (2006) ;
– sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979) ;
– pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution (1949) ;
– relative aux peuples indigènes et tribaux (OIT-1989) ;
– contre la corruption (2003) ;
– relative aux droits de l’enfant (1981), suivi des Protocoles facultatifs: a) sur l’implication d’enfants dans les conflits armés (2000); b) sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2000); c) sur la procédure de présentation de communications au Comité des droits de l’enfant (2011).
Y a-t-il un seul pays au monde qui peut se prétendre non concerné par un seul de ces sujets ?
Y a-t-il un seul pays au monde qui oserait prétendre ne pas avoir besoin d’une forme ou une autre de coopération internationale face à une seule de ces difficultés ?
Les droits humains sont imparfaits parce qu’humains : ils ne sont nés ni de source divine, ni par génération spontanée. Même si les droits humains mènent une existence misérable, ils ne sont pas responsables du contexte historique de leur naissance. Ils n’en conservent pas moins leur fondement et leur raison d’être.
[1]– Déclaration Universelle des Droits de l’homme : https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/
[2]– Pacte International des droits civils et politiques : https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/international-covenant-civil-and-political-rights
[3]– Pacte Int. Sur les droits économiques sociaux et culturels :
https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/international-covenant-economic-social-and-cultural-right
[4]– Congrès de Vienne (1993) : https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/vienna-declaration-and-programme-action
[5]– Conventions de Genève 8 :I :C :R : https://www.icrc.org/fr/les-conventions-de-geneve-et-le-droit
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(Cf. le livre « Des droits qui dérangent ? « , édité sur Amazon, en version digitale et en version papier : https://urlr.me/DHvmnJ )